Où les oiseaux des champs sont-ils passés? Une étude scientifique fait état d'une raréfaction inquiétante des populations d'oiseaux vivant en zone agricole depuis une quinzaine d'années. Le CNRS pointe du doigt l'agriculture intensive , notamment le recours massif aux pesticides.

Ils nous annoncent les beaux jours. Lorsque le printemps s'annonce, ces oiseaux égaient nos jardins et nos campagnes de leurs chants. Un concert de gazouillis aujourd'hui menacé.
 

En quinze ans, 1 oiseau sur 3 a disparu


Deux études scientifiques, publiées ce  mardi 20 mars, arrivent, chacune de leur côté, au même constat alarmant: "les populations d'oiseaux vivant en milieu agricole ont perdu un tiers de leurs effectifs en 17 ans", rapportent le Centre national de la recherche scientifique (CNRS) et le Muséum national d'histoire naturelle (MNHN).

"Nos campagnes sont en train de devenir de véritables déserts."


"La situation est catastrophique, se désole Benoît Fontaine, biologiste de la conservation au Centre d'écologie et des sciences de la conservation (Cesco) du Muséum national d'Histoire naturelle. Nos campagnes sont en train de devenir de véritables déserts." 
"Les populations d'oiseaux s'effondrent littéralement dans les plaines céréalières, et cela concerne toutes les espèces, s'émeut de son côté Vincent Bretagnolle, écologue au
Centre d'études biologiques de Chizé et directeur de la zone atelier "Plaine et val de Sèvre". Les perdrix se sont presque éteintes de notre zone d'études..."



Depuis 1989, à l'initiative du Muséum national d'histoire naturelle, plusieurs centaines d'ornithologues bénévoles recensent les oiseaux qu'ils voient et entendent au petit matin dans les aires de 4 kilomètres carrés situés en ville, en forêt ou à la campagne. "Alouette des champs, hirondelle de fenêtre, mésange noire, pigeon ramier... 175 espèces d'oiseaux communs sont inventoriés dans tous les milieux." C'est le programme STOC (Suivi temporel des oiseaux communs).

Selon l'étude STOC et celle menée en parallèle par le CNRS, "les oiseaux des campagnes françaises disparaissent à une vitesse vertigineuse (...). En moyenne, leurs populations se sont réduites d'un tiers en quinze ans."

Jusqu'à -60% pour certaines espèces en Bretagne


Pour la Bretagne en particulier, Alain Butet, chercheur CNRS à l'Observatoire des Sciences de l'Université de Rennes 1 (Osur) dresse le même constat: "La situation n'est pas nouvelle et elle s'aggrave même. Le déclin est général mais c'est dans les campagnes qu'il est le plus marqué. Les effectifs de certaines espèces ont même diminué de 50 voire 60%. (...) Dans notre région, l'alouette des champs, le coucou, le bouvreuil, l'hirondelle ou encore le chardonnet sont notamment touchés."

Victimes des insecticides néonicotinoïdes


Selon les chercheurs, ce déclin est directement lié à l'intensification des pratiques agricoles de ces vingt-cinq dernières années, "une période qui correspond entre autres, à la fin des jachères imposées par la politique agricole commune, à la flambée des cours du blé, à la reprise du suramendement au nitrate permettant d'avoir du blé surprotéiné et à la généralisation des néonicotinoïdes". Ces néonicotinoïdes, dont fait partie le Gaucho, sont des neurotoxiques accusés de provoquer la disparition, en autres, des abeilles et, plus généralement, des insectes, dont se nourrissent les oisillons.
Et le constat est le même partout. Deux études récentes ont révélé que l’Allemagne et l’Europe auraient perdu 80 % d’insectes volants et 421 millions d’oiseaux en trente ans.

Moins de plantes et de graines


"Il y a moins d'insectes mais il y a aussi moins de plantes sauvages et moins de graines, qui sont une source nutritive majeure pour de nombreuses espèces", note Frédéric Jiguet, professeur de biologie de la conservation. Que les oiseaux se portent mal indique que c'est l'ensemble de la chaîne [alimentaire] qui se porte mal."

Indicateur d'une biodiversité dégradée


Autrement dit, c'est aujourd'hui toute la biodiversité qui est menacée. " Les oiseaux sont des indicateurs, analyse Jean-Noël Ballot, membre de Bretagne Vivante et habitué du comptage d'oiseaux. Mais il faut bien comprendre que ce qui n'est pas bon pour les oiseaux ne l'est pas non plus pour nous".

Le déclin peut encore s'inverser


"Pour autant, le déclin reste réversible", assure optimiste Alain Buet de l'Osur à Rennes 1. "C'est vraiment lié à des politiques publiques. On peut encore replanter des haies, diminuer l'usage des pesticides. Il peut y avoir des recolonisations d'oiseaux. Mais il y a urgence!"

- Brest (archives 29 janvier 2017) - Jean-Noël Ballot, Bretagne vivante - Equipe: B. Le Vaillant., N.Jacob ©France 3 Bretagne

 



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